La canicule de juin 2025 n’est pas une anomalie, c’est la nouvelle norme. La France suffoque. L’Europe vacille. Depuis quelques jours, une vague de chaleur inédite s’est abattue sur le continent. Les 42°C ont été dépassés à Toulouse, Séville, Rome, Zagreb. Le bitume fond. Les nuits restent étouffantes. Et la canicule ne faiblit pas. Selon les relevés de Météo-France, la situation actuelle égale, voire dépasse, les pires épisodes enregistrés depuis 2003.

Mais cette fois, l’intensité ne fait pas tout. La durée inquiète. Et la géographie s’élargit. L’Allemagne, la Pologne et même la Scandinavie font face à des températures jamais vues. Cette canicule étire l’Europe tout entière dans une tension thermique qui fragilise déjà les services de santé, les infrastructures, les écosystèmes.

Le premier bilan humain de la canicule est terrible

En Espagne, plus de 180 décès liés à la chaleur en 5 jours. Par ailleurs, en Italie, 70 personnes âgées sont mortes à domicile, victimes de la déshydratation ou d’un coup de chaleur. En France, les services d’urgence saturent. Les appels au 15 ont triplé à Lyon, à Marseille, à Bordeaux.

La surmortalité pourrait dépasser les 15 000 décès d’août 2003. Mais cette fois, les victimes ne sont pas seulement âgées. Des ouvriers agricoles, des routiers, des enfants dans des crèches mal ventilées figurent aussi parmi les victimes. Le danger se diffuse dans tous les milieux, surtout là où l’urbanisme piège la chaleur.

Les villes deviennent des fours

À Paris, les relevés de température sur le bitume montrent plus de 55°C au sol. Le béton emmagasine la chaleur et la relâche lentement la nuit. Le phénomène d’îlot de chaleur urbain est aggravé par l’absence d’arbres, le manque de ventilation naturelle, l’imperméabilisation du sol.

Des villes comme Nîmes, Milan ou Berlin enregistrent des différences de 6 à 8°C entre centre-ville et périphérie végétalisée. Résultat : des milliers de citadins ne dorment plus, s’épuisent, tombent malades.

Les hôpitaux sous tension

Les services de santé manquent d’effectifs. Les vacances d’été ont vidé les urgences d’une partie de leurs médecins. À l’AP-HP, des salles de repos ont été réquisitionnées pour accueillir des patients. Des générateurs de secours sont mobilisés pour maintenir la climatisation dans les blocs opératoires.

Des personnes atteintes de pathologies chroniques, cardiaques ou respiratoires, voient leur état se dégrader. Les pharmacies signalent une pénurie ponctuelle de certains médicaments antihypertenseurs, à cause de la surconsommation liée au stress thermique.

Le système électrique au bord de la rupture

La demande d’électricité explose. Les pics de consommation atteignent des records en journée, dopés par la climatisation des logements, des bureaux, des transports. Le réseau est tendu. EDF a déjà dû réduire la puissance de plusieurs réacteurs nucléaires à cause de la température trop élevée de l’eau de refroidissement des fleuves.

Le risque de délestages n’est plus écarté. L’Italie, la Grèce et la Croatie ont déjà connu des pannes localisées de plusieurs heures. En France, RTE appelle à la « sobriété énergétique immédiate« , en particulier entre 14h et 18h.

La canicule met l’agriculture en péril immédiat

Les cultures grillent sur pied. Le maïs se dessèche dans le Sud-Ouest. Les vignes subissent un stress hydrique précoce en Bourgogne. Les éleveurs doivent abreuver leurs bêtes avec de l’eau potable acheminée par camions.

Selon les premiers calculs de la FNSEA, les pertes pourraient dépasser 2 milliards d’euros si l’épisode caniculaire se prolonge encore deux semaines. Le prix des fruits, des légumes, du lait pourrait s’envoler dès juillet sur les marchés.

Les forêts en flammes

Au Portugal et en Grèce, les incendies ont déjà ravagé des milliers d’hectares. Le vent chaud et sec propage les feux à grande vitesse. En France, plus de 1 200 pompiers luttent contre un feu majeur en Gironde. Des dizaines de départs de feu sont signalés chaque jour dans le Sud-Est, les Cévennes, le Var.

Le manque d’eau et l’épuisement des brigades accentuent la menace. L’Office national des forêts parle d’une “saison de feu” qui pourrait durer jusqu’en novembre, si les pluies estivales ne reviennent pas.

Comment se protéger efficacement de la canicule

Boire au moins 2 litres d’eau par jour, même sans soif. Éviter toute activité physique entre 11h et 18h. S’habiller léger, se mouiller régulièrement les bras et le visage. Fermer les volets le jour, aérer uniquement la nuit.

Mais ces gestes ne suffisent plus. Il faut repenser les bâtiments. Multiplier les îlots de fraîcheur. Adapter l’horaire des services publics. Protéger en priorité les plus vulnérables. Dans plusieurs départements, les mairies organisent des appels téléphoniques de veille pour les personnes âgées isolées.

Une répétition du futur climatique

Cette canicule est une alerte. Elle préfigure le climat que connaîtra l’Europe tous les étés d’ici 2040, selon le GIEC. Des étés plus longs, plus chauds, plus meurtriers. Avec des températures supérieures à 45°C dans les plaines françaises, italiennes ou hongroises.

Et même si l’Europe parvient à réduire ses émissions, ces phénomènes sont désormais inévitables pour les deux prochaines décennies. Le réchauffement planétaire déjà engagé provoque une hausse rapide des extrêmes thermiques.

Faut-il quitter les grandes villes

Les scénarios d’adaptation changent. Des agences de conseil environnemental recommandent déjà des relocalisations partielles. Certaines familles envisagent de quitter Paris, Marseille ou Rome pour s’installer dans des zones plus tempérées ou boisées.

Les zones rurales en altitude attirent. Les villes moyennes deviennent des refuges thermiques. Mais elles manquent d’infrastructures pour absorber un exode urbain climatique. Les politiques d’aménagement du territoire restent très en retard.

Vers une crise d’assurance

Les assureurs évaluent déjà les dégâts à plusieurs centaines de millions d’euros. Toitures fondues, appareils électriques hors d’usage, bâtiments fissurés par la chaleur. Mais les contrats couvrent rarement les pertes liées aux vagues de chaleur sans sinistre matériel.

Les agriculteurs, les restaurateurs, les commerçants en première ligne appellent à une réforme du régime des catastrophes naturelles. Un projet de loi est en discussion, mais le gouvernement temporise, pris entre urgence climatique et explosion budgétaire.

Voir aussi: L’Europe face à la flambée des prix de l’électricité en 2025

La canicule de juin 2025 dépasse les capacités actuelles de résilience de nos sociétés. Boire, s’abriter, ralentir ne suffisent plus. Il faut transformer nos habitats, nos mobilités, notre alimentation. Et surtout, anticiper. Car l’enfer thermique n’attend pas 2100. Il est déjà là.